Courteline chez La Fontaine

Publié le par Yohann Abiven

 

On ne voit pas la ville à cause des maisons. Ou plutôt, on ne voit pas la ville à cause des éoliennes. Ou plutôt, on ne voit pas la communauté de communes de la région de Château-Thierry (la CCRCT) à cause des éoliennes. Car, et c’est L’Hebdo des socialistes qui nous l’apprend, la communauté de communes de la région de Château-Thierry, la déjà citée CCRCT, veut produire, à moyen terme, 100 % d’électricité verte. La planète dira bientôt merci aux hélices de la communauté de communes de la région de Château-Thierry et la démocratie aussi. Et les Castelthéodoriciens aussi. Et les agriculteurs de la région de Château-Thierry aussi. Les sages-femmes aussi. Les architectes aussi. Les amis de la nature aussi. Les fins lettrés de la société savante castelthéodoricienne aussi. Tous diront, à propos des engins éoliens, « c’est là qu’y fallait les mettre et surtout pas là ! »

Il faut dire que, pour en arriver là, justement, la communauté de communes de la région de Château-Thierry a voulu éviter de mettre les doigts dans la prise. « Des rencontres, je cite L’Hebdo des socialistes du 24 février 2007, des rencontres donc, ont été organisées sous le contrôle d’une personnalité indépendante choisie au sein de la Commission nationale du débat public. ». J’imagine que les chers auditeurs, comme moi, découvrent, grâce à L’Hebdo des socialistes ou seulement grâce à ce billet radiodiffusé s’agissant des chers auditeurs non membres du parti de Jaurès, découvrent donc l’existence d’une Commission nationale du débat public ou plus exactement s’étonnent d’une concurrence au sommet de l’Etat. Car jusqu’ici nous connaissions le Parlement, qui, au final n’est rien d’autre qu’une grande Commission nationale du débat public. Fort heureusement la République ne parle pas ainsi. Jusqu’ici aussi nous connaissions nos assemblées délibératives locales qui, une fois encore, ne sont que des commissions locales du débat public. Fort heureusement la Province ne parle pas ainsi. Toutes ces institutions que la République voulait farouchement indépendantes doivent vraiment remplir leur rôle très imparfaitement pour que les esprits éclairés pensent leur adjoindre une plus sage Commission nationale du débat public.

Mais au fait, qui siège à la Commission nationale du débat public ? Des fonctionnaires, des experts probablement, enfin des personnalités qualifiées pour le débat, étrangères aux gesticulations et querelles politiques. Qu’il doit être agréable d’oeuvrer au sein de la Commission nationale du débat public... Il doit émaner de tous ses collaborateurs une chaude atmosphère d’écoute, de dialogue, de compréhension mutuelle, d’attention à l’autre, d’humanité, tout simplement. Bientôt on ne parlera plus des gens bien élevés, seulement des choses bien débattues et des populations positivement dialoguantes, de celles qui désormais se recontrent à la communauté de communes de la région de Château-Thierry. Et les heureux habitants de la CCRCT pourront dire aux enfants sages : « Travaille dur et un jour, tu finiras à la Commission nationale du débat public ».

En tout état de cause, à Château-Thierry, le recours à ce machin commissionné a abouti à rien de moins que, je cite encore L’Hebdo des socialistes, « la rédaction d’un document qui tient compte des contraintes liées à la mise en œuvre du projet ». Les mauvaises langues, dont nous ne sommes pas, récrimineront. Elles feront remarquer que tenir compte des contraintes liées à la mise en œuvre d’un projet est une lapalissade de l’élémentaire prudence, et que l’envoi par la Poste des oeuvres de Saint-Thomas ou d’Aristote au maire de Château-Thierry aurait rassuré le porte-monnaie castelthéodoricien et épargné à la « personnalité indépendante choisie au sein de la commission nationale du débat public » un coûteux aller-retour jusque sur les terres de Jean de la Fontaine.

Mais s’étonner qu’une Commission nationale du débat public travaille sous des auspices éoliens, c’est plus que jamais se battre contre des moulins à vent.

 

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